Le bonheur en berne au Québec

Le bonheur en berne au Québec

L’Indice de Bonheur Léger (IBL) à son niveau le plus faible depuis sa fondation en 2006. Et de loin.

Il fallait s’y attendre. La pandémie n’épargne personne et affecte considérablement le niveau de bonheur des Québécois. Alors que la mesure globale de l’IBL était de 75,20 en date du 29 février dernier, elle est passée à 69,60 depuis le début du confinement, soit le 13 mars 2020 (basée sur 657 répondants).

Jamais, depuis la fondation de l’Indice de Bonheur Léger (IBL) en 2006, le niveau de bonheur des Québécois ne s’est retrouvé aussi bas. Cette autoévaluation est de 5,60 points plus basse que celle d’avant la crise. Auparavant, le niveau de bonheur le plus faible avait été enregistré au début de 2010, à la sortie de la crise financière de 2009, avec un IBL québécois moyen de 74,48.

Certains diront que 5,60 points de baisse, c’est peu, mais lorsqu’on parle d’un niveau de bonheur collectif, c’est énorme et encore davantage sur une si courte période de temps (deux mois). Il faut comprendre que depuis 2006, l’IBL québécois ne fluctue que très peu et se situe presque toujours entre 75 et 76. Un écart de 5,60 points s’avère évidemment très significatif, mais surtout préoccupant, car il en faut beaucoup pour affecter, ne serait-ce que de quelques points, le niveau de bonheur d’une société.

 

L’impact du confinement sur les plus jeunes

La crise affecte le bonheur de tout le monde, mais les plus jeunes sont particulièrement touchés. Imaginez! Alors qu’au 1er mars 2020, il existait un écart de 7,56 points de l’IBL entre les personnes de 65 à 74 ans et celles de 18 à 24 ans, cet écart est maintenant passé à 13,20 points depuis le début du confinement. Presque le double.

Ces données nous confrontent à un paradoxe particulier : alors que les personnes plus âgées sont, et de loin, les plus sévèrement touchées par la COVID-19, leur niveau de bonheur n’en est cependant que peu affecté (écart de 0,90 point de l’IBL pour les 65-74 ans). À l’inverse, les jeunes, pourtant peu affectés par ce même virus, voient leur IBL chuter dramatiquement(écart de 6,54 points). Les chiffres ne le disent pas directement, mais ils suggèrent que le confinement provoqué par la COVID-19 affecte sérieusement le bonheur des plus jeunes et plus particulièrement celui des 35-44 ans (écart de 9,56 points). Le graphique qui suit s’avère révélateur.

 

IBL selon l’âge au 1er mars et entre le 13 mars et le 7 mai (confinement)

 

 

La baisse de l’IBL depuis le confinement est légèrement plus marquée chez les hommes (recul de 6,26 points de l’IBL masculin vs 5,20 points pour l’IBL féminin).

 

Deux grands enjeux sociaux

En ces temps de pandémie, les chiffres de l’IBL dévoilent une réalité sociale que l’on ne peut ignorer : les deux extrémités de la strate démographique sont affectées. Les plus âgées, parce qu’on les laisse mourir sans soin et dans la presque indifférence. Les plus jeunes, parce que la société ne leur propose rien de bien réjouissant. Sinon, comment expliquer, depuis 14 ans, le lent glissement de leur niveau de bonheur, l’un des plus élevés en 2006 et passé au plus faible en 2016? Une glissade qui se poursuit jusqu’à aujourd’hui.

Pendant que les personnes âgées meurent par milliers, les jeunes sombrent dans une même proportion. L’analyse des données de l’Indice de Bonheur Léger (IBL) depuis le confinement suggère plusieurs questionnements. Reste à trouver les solutions.

 

Petit rappel : Covid-19 et crise financière de 2009

La crise financière de 2008/2009 n’a rien de comparable avec la pandémie que nous vivons, mais il est intéressant de voir de quelle façon cette crise a touché les Québécois pour mieux anticiper les impacts de la Covid-19.

Outre un niveau de bonheur plus faible lors de cette crise, deux données économiques sont révélatrices. En 2009, 31% des répondants avaient avoué que la crise les affectait financièrement et 50% songeaient à modifier certaines de leurs habitudes de consommation.

Parmi ces habitudes, les plus souvent mentionnées référaient aux voyages et/ou vacances, aux sorties culturelles et aux travaux d’aménagement et de rénovation de leur chez-soi.

Qu’en sera-t-il de cette pandémie historique?

 

Note méthodologique :

L’Indice de Bonheur Léger (IBL) est basé sur l’auto-évaluation de plus de 100 000 répondants depuis 2018 dont 657 Québécoises et Québécois entre le 13 mars et le 7 mai. L’IBL est calculé sur la base d’un algorithme développé par Léger à partir d’un questionnaire de 34 questions.